UNE ORIGINE AU MOINS GALLO-ROMAINE
PEUT-ÊTRE UNE COLONIE GRECQUE ?
Certains pensent qu'il y aurait eu, de fort bonne heure, à Ydes, une petite colonie grecque essaimée de Marseille ou de Bordeaux. Ils se fondent, pour ainsi conclure, sur d'ingénieux raisonnements toponymiques. Ainsi le nom d'Ydes viendrait-il de grec Eidos : image, statue ou idole. Ainsi encore, comme la fameuse charte dite de Clovis fait allusion à un roi Bassolus qui serait à rapprocher du grec Basileus, tel serait tenté d'y voir une preuve nouvelle d'une possible origine helleno-phocéene. Une hypothèse séduisante certes, mais qu'aucune trouvaille archéologique n'est venue confirmer.
UNE STATION GALLO-ROMAINE LARGEMENT ATTESTÉE
Son existence cette fois est fermement prouvée par de multiples vetiges épars, dans la commune. Les plus importants ont été mis au jour dès le début du XIXème siècle par Jean-Baptiste de Ribier du Châtelet qui les décrit dans ses communications. D'autres ont été exhumés plus tardivement . Ils sont de types très divers :
"Ce pays renferme de nombreux tumulus ; quelques-uns ont été fouillés, et l'on y a découvert un poignard antique, des cendres, des vases, des médailles de la colonie de Nîmes, des débris de poterie noire, rouge et grise ; de la poterie dorée provenant d'urnes cinéraires brisées..."
"Au domaine de Vic, situé à peu de distance, au nord du chef-lieu, on retrouve... des débris d'antiquités gallo-romaines, principalement de la poterie rouge ouvrée et à dessins variés, représentant des divinités de la Fable, des animaux de diverses espèces, des chasses, etc..." Il s'y trouve aussi des "fondations d'édifices, et des débris qui semblent attester l'existence en lieu ce lieu d'un ancien cimetière".
"A Montfouilloux, à l'est et près du bourg on a découvert des restes de constructions romaines ; une lionne-fontaine lançant l'eau par la gueule, des médailles des empereurs et les vestiges d'une habitation dont les murs intérieurs étaient décorés de peintures à fresque, à couleurs très vives..."
DES THERMES
Une rue d'Ydes porte le nom de rue des Bagneyres, et le pré où se situaient les thermes est aujourd'hui encore dit Pra di Bagneyras. Pour y accéder il faut prendre, sur cent mètres, le petit chemin à droite du chevet de l'église et passer devant le presbytère désaffecté.
En 1822, J.B. de Ribier du Châtelet a découvert dans ce pré de nombreux silex, des médailles et divers objets. Il put surtout y lever les plans des fondations d'un véritable établissement de bains romains.
Ces thermes étaient constitués de cinq chambres pavées de ciment blanc qui formaient autant de piscines. Il y existait un système de chauffage du type hypocauste. Celui-ci était composé de 27 piliers de 0,70 m de haut et espacés les uns des autres de 0,33 m. Ils supportaient une chape en ciment de 0,20 m d'épaisseur. Un canal recouvert de chaux fondue reliant le petit ruisseau d'Ydes aux bains assurait l'alimentation en eau. Il y a là la preuve certaine d'un peuplement gallo-romain relativement important et vivant. Aujourd'hui on ne voit plus dans le pré, émergeant du gazon, que quelques vestiges d'une épaisse muraille de briques et de piertes. Mais on sait au surplus que des canalisations en plomb traversent toujours les jardins environnants.
UNE VOIE ROMAINE
D'autres fouilles ont permis de découvrir, sur le territoire de la commune, un tronçon de voie romaine. Ydes se trouvait en effet sur le tracé majeur qui, partant de Clermont, aboutissait à Rodez (Sejodunum) en passant par le Mont-Dore, La Bourboule, Mauriac et Aurillac. Une borne miliaire dédiée à l'empereur Postumus, que le hasard a fait déterrer en 1885 entre La Gorce et Largnac, est venue confirmer l'existence de cette voie. (La borne mesure 1,67 m sur 0,44 m).
Ce vestige, ainsi que la lionne de Montfouilloux déjà citée, sont visibles dans la chapelle du château de Val (commune cantalienne de Lanobre) dont la ville de Bort-les-Orgues est propriétaire. Des démarches sont entreprises en vue de la restitution de ces biens précieux appartenant à Ydes.
L'ÉPOQUE MEDIEVALE
DIVERS TEMOIGNAGES ET TEMOINS EPARS
Le Moyen-Age a d'autres témoins à Ydes que "l'Histoire des Francs" et la Vie des Pères de Grégoire de Tours dont nous savons par lui-même qu'il a visité le pays autour de Chastel-Marlhac (Castrum Méroliacum) en la compagnie de Saint-Avit, évêque de Clermont. Ainsi la charte dite de Clovis mentionne-t-elle, à Ydes, l'existence fort ancienne de deux églises dont l'une était "située sur un monticule du voisinage appelé Puy de l'Eglise". Il y aurait eu, de plus, d'autres monuments religieux, telles les chapelles de la Garde, de Fleurac et de l'Ermitage de sainte Radegonde, ce dernier édifice encore marqué par une fontaine au bas du Puy de Largnac ou Puy de Fousty.
Ainsi les chartes rassemblées par M. de Ribier du Châtelet nous renseignent sur un régime féodal qui ne fut pas seulement une organisation politique et militaire mais une structure economique puissamment originale avec ses tenures rurales diverses, ses moulins et ses fours, ses pêcheries et ses canaux d'irrigation et, surtout, l'aménagement de ses villages en mas, barricades et coudères.
UN CHEF-D'OEUVRE MAJEUR : L'ÉGLISE DE LA COMMANDERIE
D'abord et avant l'église, naquit la Commanderie. Elle fut à l'Ordre du Temple d'abord, aux Hospitaliers de Saint-Jean ensuite.
La Commanderie d'Ydes dépendait dès l'origine de la milice du Temple. l'époque précise de sa fondation, de même que le nom de son fondateur sont ignorés ; néanmoins, il peut être présumé avec fondement qu'elle remontait à une date antérieure à celle de la construction de l'église, et qu'elle dût son établissement à l'un des Seigneurs de la Maison de Madic qui, au XIIème siècle, fournissait des dignitaires à l'Ordre du Temple.
Indépendamment des biens et rentes dont elle jouissait au lieu de son siège et dans les environs, la Commanderie avait des annexes plus ou moins importantes, notamment celle de l'Hôpital, située dans la même paroisse, celle de Courtilles, et enfin celle de Longevergne.
A l'Hôpital il y eut sans doute à l'origine une petite léproserie que les Templiers, comme ils le faisaient souvent, transformèrent en "Hospital".
La Commanderie d'Ydes jouissait du Droit de Justice dans le bourg et sur toutes autres possessions ; elle y était exercée par des officiers institués par l'Ordre, en vertu d'un Traité passé entre Bertrand III, Sire de la Tour d'Auvergne, et Gérard de Sauzet, Commandeur du Temple en 1281.
Mais bientôt, lorsque le roi Philippe II le Bel (1307) s'en prit à l'Ordre du Temple, le dernier Commandeur du lieu, Etienne d'Ydes, dit de La Roussille, fut arrêté le 4 juin 1309. Interrogé d'abord à Clermont par l'évêque Ancelin, il fut transféré à Paris l'année suivante.
Ainsi démantelé par le Procès des Templiers, le domaine d'Ydes devint, en 1371, propriété de l'Ordre des Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem.
Dès son arrivée en possession, le nouvel Ordre obtint du Pape Jean XXII divers privilèges, entre autres celui que l'église d'Ydes relèverait directement du Saint-Siège ; privilège que les Commandeurs firent toujours respecter, car Joachim d'Estaing, évêque de Clermont, ayant voulu, dans la première moitié du XVIIème siècle, soumettre la dite église à la visite épiscopale, le Commandeur en appela comme d'abus, en invoquant la bulle pré-citée et une autre de Léon X, de l'an 1571, de sorte que l'évêque dut renoncer à ses prétentions.
L'Ordre de Malte avait soin de veiller à la bonne tenue de l'église ainsi qu'à la régularité du service religieux, par de fréquentes inspections de commissaires ad-hoc.
Jouissant du droit de Justice, un seul Commandeur, Guichard Courtin, eut la faiblesse de céder le degré d'appel de Joachim de Chabannis, Comptour de Saignes, et de se reconnaître son vassal par traité du 3 avril 1549 ; mais il fut désavoué par ses supérieurs et le traité fut annulé par Lettre du Roi Henri II, du 13 novembre 1553.
Le dernier inventaire des biens de l'Ordre de Malte a été dressé à Ydes le 22 novembre 1772 par le Grand Prieur d'Auvergne, François Louis de Bosredon. Il fait état d'une propriété rurale avec ses bâtiments d'exploitation, dont le revenu est de 1755 livres, de l'église Saint-Georges, et de la maison du Commandeur avec tour d'angle, perron à degrés en pierre de taille et cheminée monumentale portant monogramme du Christ. Cette maison, récemment restaurée, est la dernière dans le bourg d'Ydes, sur la gauche en se dirigeant sur Saignes.
Sur le pignon ouest de cette maison, on aperçoit, de la route menant à Saignes, une porte basse surmontée d'une très belle pierre portant, elle aussi, le monogramme du Christ.
Le domaine du Temple a été vendu comme bien national le 28 brumaire et le 29 ventose An II. La première vente a fait 29.700 livres et la seconde 29.650 livres. Selon la tradition, la cloche de l'église aurait été enterrée pour ne pas être livrée à la réquisition.
L'ÉGLISE SAINT-GEORGES
L'édification de l'église paroissiale par des Templiers, moines soldats, a précédé de trente ans environ l'annexion de l'Auvergne à la France par Philippe-Auguste en 1189, après qu'il eut fait la paix avec Richard Coeur de Lion et se fut retourné contre le Dauphin d'Auvergne à qui il reprochait d'avoir joué un double jeu entre le Roi de France et celui d'Angleterre.
L'Église Saint-Georges a une longueur totale dans l' oeuvre de 28,70 m ; la largeur de la nef est de 6,70 m. Elle fut quelque peu remaniée au cours des siècles. Ainsi, sa voûte s'étant effondrée en 1680, elle fut reconstruite. L'édifice primitif se vit également doté, plus tardivement de chapelles latérales. Elle a cependant gardé dans l'ensemble ses caractères d'origine, et elle compte parmi les plus beaux ensembles et les plus originaux de la Haute-Auvergne.
DU XVème AU XVIIIème SIÈCLE
LE XVIème SIÈCLE
Pendant la guerre de Cent Ans, c'est pour se défendre contre les routiers des Grandes Compagnies encore plus que contre les Anglais que furent construits les châteaux fortifiés de Chavagnac en 1443, par Louis Charpentier et du Châtelet en 1448 par Gérard Chapitout ; ils furent des avant-postes et des tours de guet pour la puissante forteresse de Charlus, dont le redoutable Aymerigot Marches s'était emparé par surprise.
En 1429, les Etats d'Auvergne avaient voté à Jeanne d'Arc une aide de guerre de 13.000 écus d'or. Plus tard, ce furent des munitions et des hommes qu'ils lui envoyèrent, et nombre de familles auvergnates comptent parmi leurs ancêtres des soldats qui furent engagés, blessés ou tués à la bataille de Jargean et au cours de la campagne de la Loire.
Les Anglais qui remontaient les cours des rivières sont passés à Ydes avant d'aller incendier Neuvialle. La guerre de Cent Ans a laissé ici des vestiges toponymiques : croix des Anglais, maisons de l'Anglais, etc...
Au cours des guerres de religion, Ydes n'eut à souffrir que de brèves incursions des soldats de Bourbon-Malauze qui tenaient garnison au château de Miremont, dont les ruines se voient encore près de Mauriac, dominant les gorges de la Dordogne. Henri de Bourbon-Malauze, qui appartenait au parti protestant, était le mari de Madeleine de Saint-Nectaire, amazone intrépide dont Henri IV disait, après qu'elle eut battu les troupes d'Hugues de Montal, qu'elle était la seule femme qu'il eût voulu être.
C'est le Grand Siècle, certes, mais c'est le temps aussi des troubles de la Fronde, des guerres interminables et des impôts écrasants pour le menu peuple.
En 1636 et 1649, en divers points de la Prévôté de Mauriac, les paysans ont fait la grève de l'impôt et, au nombre de 1.500 environ ont pris les armes. Ils sont réduits, non sans mal, par le Prévôt La Carrière qui a pris la tête des troupes de la Marée-chaussée (actuelle Gendarmerie).
La Duchesse de Condé a voulu entraîner l'Auvergne dans la guerre de la Fronde. Le 14 mai 1650, elle a passé en revue ses partisans à Moussanges et à Lavigne près de Mauriac. Elle abattait à cheval ses cent kilomètres par jour.
Puis les chefs des principales familles prirent du service dans les armées et les administrations du roi et ce fut le commencement de l'absentéisme.
Après un début malheureux, marqué par bien des hivers rigoureux et quelques disettes, le XVIIIème siècle se déroula dans nos campagnes sous de meilleurs auspices que le siècle précédent. Sur le domaine de la Commanderie d'Ydes, les Chevaliers de Malte restaient attachés à la culture du seigle et du froment, ainsi qu'à celle du lin qu'ils sont à peu près les seuls à produire. Des officiers de cavalerie en quartier à Saignes où se fait la remonte des chevaux tentent d'introduire l'industrie dans la région, M. d'Anthenaire par l'installation d'un atelier de confection d'effets militaires (soutaches,ceinturons, tresses en poils de chèvre), et M. de Vichy qui utilisait la baguette des sourciers, en faisant la prospection du charbon de terre.
D'après le rôle des tailles à Ydes en 1786, il y avait alors sur la commune 158 habitants, dont quinze pour plus de vingt livres. Les maisons que l'on construit et dont beaucoup subsistent, témoignent, elles aussi, d'une honnête aisance.
La Révolution de 1789 n'a apporté aucun trouble violent à Ydes mais en a modifié l'économie par la nationalisation du domaine d'ydes à l'Ordre de Malte, de celui de Vic à la Maison de Chabannes et de celui de Fleurac à la Maison de Laquenille. Le domaine du Châtelet et de la Gorce à Mme de Chalus fut mis sous séquestre. Des scellés furent apposés, des armoiries détruites ; mais les personnes furent moins inquiétées qu'en d'autres paroisses, parce qu'à l'inverse de celles de Champagnac, Bassignac, Sauvat et Chastel, la commune d'Ydes ne fut pas jacobine. Les domaines nationalisés y furent mis en vente ; celui d'Ydes, qui était grand, en deux lots, et celui de Fleurac qui était petit, en trente minuscules parcelles.
DU XIXème AU XXème SIÈCLE
Le XIXème siècle est pour la France (et l'Europe) l'âge de la révolution industrielle. Le charbon et le chemin de fer en furent les outils et les symboles.
Le bassin d'Ydes-Champagnac fut dans le Cantal, la seule région concernée par ce phénomène, qui bouleversa le pays de la Sumène à partir de 1875.
LES ORIGINES
Le plus ancien document relatif aux Houillères de Champagnac, Ydes et Vendes, est un acte du 5 septembre 1531, passé entre le Comte de Miremont et les héritiers Malchaval. Dans son Histoire de l'Auvergne Legrand d'Aussy écrit : "On trouve beaucoup de charbon le long de la Dordogne... Il y a une mine découverte depuis longtemps à Lempret" et, dans son procès-verbal de visite de la Commanderie d'Ydes, Louis de Bosredon, Chevalier de l'Ordre de Malte, fait mention des mines de la Sumène et plus particulièrement de celle qui vient d'être ouverte près du village de Largnac, paroisse d'Ydes.
En 1808, rapport de l'ingénieur Berthier ; en 1840, Mignot, concessionnaire, produit 4.000 quintaux de fonte par an avec le charbon qu'il extrait. En 1852, c'est l'emploi de la première machine à vapeur.
En 1886, la concession minière est achetée par M. Edmond Pochat qui équipe la mine et fait de l'Hôpital-Ydes un centre industriel important.
LA CROISSANTE POPULATION OUVRIERE
L'approche démographique est éclairante :
L'exploitation charbonnière explique la particularité de la démographie à Ydes, qui est la fixation d'une importante population ouvrière sur son territoire.
Le développement du Bassin Charbonnier d'Ydes fut tardif et rapide :
Cette expansion fut stimulée par l'arrivée du chemin de fer de la ligne d'Eygurande-Ydes (1882).
Les mineurs furent souvent logés par la compagnie minière. De nombreux ouvriers polonais s'installèrent alors à Ydes y formant une colonie très vivante, de nos jours parfaitement intégrée.
Tandis que Ydes-Bourg resta fidèle à sa vocation agricole et consacra ses larges prairies à l'élevage, une agglomération toujours plus dense se créa à l'Hôpital-Ydes, à proximité des mines de charbon et d'autres établissements industriels telle que la coopération laitière de Saignes. Les deux anciens officiers, Monsieur de Vaublanc et Monsieur Espinasse, fondateurs de l'entreprise laitière, décidèrent à Ydes l'implantation d'une installation de ramassage et de premier traitement. Cette société fut une des premières de France. Elle contribua puissamment au progrès de notre élevage mais aussi freina l'exode rurale.
Malgré la fermeture de la mine, en 1960, la vocation industrielle de la Commune d'Ydes se retrouve, encore de nos jours, dans la mentalité des habitants.
C'est en 1970, sous l'impulsion de Bernard Ceyrac, Maire de la Commune, que l'Hôpital-Ydes devint Ydes-Centre et Ydes (à 2 km) Ydes-Bourg.
Extrait de "Ydes au fil des siècles" - Dominique MARION - 1994